Frichti n°8


Week-end frichti avec le meilleur des musiques autres, en tout objectivité bien sûr. Trois œuvres qui devraient faire dans vos cœurs des travaux d'aménagement sans ménagement pour peu que vous pratiquiez les plaisirs de l'abandon (une citation d'Alain Souchon se cache dans ce préambule). 

Preisig & Rusconi - Levitation (QILIN Records, 2016)
Écoute intégrale tout d'abord, celle d'un duo atypique, Stefan Rusconi et Tobias Preising officiant respectivement à l'orgue et au violon. Enregistré en cinq nuits dans l'église Saint Etienne de Cully en Suisse, Levitation donne à entendre l'acoustique spirituelle des lieux, comme s'il fallait en saisir la présence. Les musiciens délivrent une partition semi-improvisée pour nouer un étonnant dialogue de silence, de lenteur et de répétitivité entre ambient liturgique et impressionnisme diffus. Rusconi et Preising habités par l'atmosphère de l'église et de la nuit font ici preuve d'une impressionnante acuité sensorielle. Il suffira d'écouter le premier morceau pour s'en convaincre.




Isnaj Dui - "Answers At Dawn" (Was ist Das, 2016)
Découverte d'Isnaj Dui avec ce long morceau de 18 minutes qui apparaît en face B d'une split K7 en compagnie de These Feathers Have Plumes en face A. Cette flûtiste de formation qui maîtrise aussi l’électroacoustique appose de longues boucles de flûte traversière avec des rythmes balinais joués par un dulcimer. Contraste magnifique entre douceur primitive et heurts cristallins et belle sidération à l'écoute de cette musique presque imémorielle : on se laisse porter par ces impressions hors du temps.




Thierry Müller & Quentin Rollet - On Your Body's Landscape (Bisou Records, 2015)
Il serait dommage de passer à côté de On Your's Body Landscape de Thierry Müller & Quentin Rollet sorti l'année dernière. Olivier Lamm pour The Drone s'est heureusement chargé de la mise en lumière, vampirisant par la même occasion ce que nous avions à dire en moins bien sur ces deux artistes. Au delà du parcours impeccable du saxophoniste Quentin Rollet, rappelons aussi que la fondation du label Rectangle avec Noël Akchoté a permis dans les 90's d'accompagner toute la génération post-rock/noise dans la découverte de free-jazz et des musiques improvisées, lui permettant par le même occasion de découvrir des artistes aussi fabuleux que Derek Bailey, Jean-François Pauvros, Charli O, Eugene Chadbourne, Red, Akosh Szelevényi... Merci pour tout et merci encore pour ce "Rêve de Mandarine", irréelle alchimie entre saxophone et proto-electronique.